La crise provoquée par la panne d’électricité à l’aéroport international de N’Djili dans la nuit du 10 au 11 septembre 2025 continue de faire des vagues. Après avoir lui-même suspendu le commandant de l’aéroport pour « manquements graves aux procédures », le Directeur général de la Régie des Voies Aériennes (RVA), Ngoma Mbaki Léonard, a été à son tour suspendu ce vendredi par un arrêté de la ministre du Portefeuille, lu sur les antennes de la RTNC.
Ngoma Mbaki Léonard, DG de la RVA suspendu
Cette décision traduit la gravité d’un incident qui a mis en cause la sécurité de l’avion présidentiel et révélé les fragilités des infrastructures aéroportuaires congolaises.
Retour sur les faits : un aéroport plongé dans le noir
Dans la nuit du 10 au 11 septembre, de 00h24 à 05h20 (TU), N’Djili a été paralysé par une panne généralisée d’électricité. Les communications entre la tour de contrôle et les appareils en approche ont été fortement perturbées, tandis que l’aéronef présidentiel (DRC0001), de retour à Kinshasa, a dû retarder son atterrissage.
Bien qu’aucun accident majeur n’ait été signalé, l’événement a déclenché une chaîne de réactions disciplinaires et une crise de confiance autour de la gestion d’une infrastructure aussi sensible. Plusieurs agents ont été interpellés, et une enquête interne a été ordonnée par le président du Conseil d’administration de la RVA, Tryphon Kin-Kiey Mulumba.
SNEL écartée, la RVA au banc des accusés
Rapidement, la Société nationale d’électricité (SNEL) a nié toute responsabilité : aucune coupure n’aurait affecté son réseau cette nuit-là. Selon ses explications, la panne viendrait d’une défaillance interne au système de secours de la RVA — inverseur défectueux, protocole mal appliqué, absence de techniciens qualifiés sur place. Ce scénario déplace la responsabilité vers la gestion technique et humaine de l’aéroport, et met en cause la capacité de la RVA à assurer la continuité des services en cas d’urgence.
Des failles structurelles mises en lumière
L’incident révèle trois grandes faiblesses :
La vétusté des équipements : inverseurs, groupes électrogènes et systèmes de secours ne répondent pas aux standards modernes de redondance; Le manque de formation et de discipline opérationnelle : les techniciens en astreinte n’auraient pas maîtrisé les procédures d’urgence; Une gouvernance réactive mais non préventive : les suspensions punitives masquent l’absence d’une stratégie durable d’investissement et de contrôle.
Conséquences multiples : sécurité, image, diplomatie
Ce black-out dépasse le simple incident technique. Il affecte : La sécurité aérienne, en particulier pour les vols officiels et diplomatiques; La réputation de la RDC comme hub régional fiable;Les relations diplomatiques, puisque des retards ou déroutements d’appareils officiels étrangers peuvent ternir la crédibilité du pays.
Les pistes de redressement
Face à cette crise, plusieurs solutions sont envisagées : Audit technique indépendant des installations électriques critiques; Formation renforcée et certification des techniciens de permanence; Plan de modernisation urgent (inverseurs automatisés, éclairage LED de piste, systèmes redondants); Contrats clairs entre la RVA, la SNEL et les prestataires privés avec obligations de résultats; Transparence sur les conclusions de l’enquête et calendrier des réformes.
Un signal d’alarme pour l’État
L’affaire de N’Djili illustre le décalage entre les besoins réels des infrastructures stratégiques et la capacité des gestionnaires à les sécuriser. La suspension du DG de la RVA, après celle du commandant de l’aéroport, montre que la responsabilité est recherchée au sommet. Mais sans investissements lourds et réforme de gouvernance, le risque de récidive demeure.
Ce black-out restera un test pour l’État congolais : savoir si cette crise débouche sur un simple jeu de sanctions ou sur une véritable refondation de la sécurité aéroportuaire nationale.
Junior Kulele
