Une campagne visuelle et émotionnelle lancée par la Fédération congolaise de football association (FECOFA) a envahi les réseaux sociaux. Présentée sous forme d’énigme patriotique autour des couleurs du drapeau congolais, beaucoup y voient un teasing du nouveau maillot des Léopards.

Mais au-delà du marketing sportif, cette campagne ressemble davantage à une réponse subtile, mais ferme, aux tensions qui agitent l’opinion publique depuis plusieurs mois : la question des binationaux, la place des locaux, et plus largement, qui mérite vraiment de porter le maillot de l’équipe nationale. Le texte diffusé par la FECOFA se veut fédérateur : « Ces couleurs portent en elles une histoire, une émotion, une fierté… Elles unissent nos voix, nos provinces, notre diaspora… Parce que ces couleurs ne sont pas seulement celles d’un maillot… Ce sont les nôtres. Celles qui nous rassemblent derrière nos Léopards. »
Le message est clair : le maillot appartient à tous les Congolais, où qu’ils se trouvent. Dans un contexte de débats de plus en plus virulents sur les origines des joueurs, la FECOFA recentre le discours sur l’essentiel : la sélection n’est pas une affaire de naissance, mais de mérite et de performance. Depuis plusieurs mois, l’arrivée de nombreux joueurs binationaux en sélection nationale suscite de fortes réactions. Certains supporters estiment qu’ils prennent la place des talents évoluant au pays. D’autres dénoncent l’idée que certains binationaux ne viendraient en sélection que par opportunisme.

Ces débats ont été amplifiés par les réseaux sociaux et certains chroniqueurs sportifs, créant une véritable fracture émotionnelle entre : ceux qui défendent les locaux, ceux qui valorisent l’apport des binationaux, et ceux qui souhaitent un équilibre entre les deux. Or, la FECOFA semble vouloir rappeler un principe central de toute sélection nationale : la priorité va aux meilleurs, indépendamment de leur lieu de naissance. En affirmant que « ces couleurs nous rassemblent », la FECOFA recadre subtilement la conversation. Elle ne répond pas frontalement aux polémiques mais utilise le symbole le plus puissant qui soit : le drapeau et le maillot national.
Le message sous-jacent est limpide : Peu importe que le joueur soit né à Kinshasa, Paris, Bruxelles, Goma ou Londres. Peu importe qu’il vienne de la Linafoot, de la Ligue 1, de la Jupiler League ou de la Premier League. Ce qui compte, c’est qu’il apporte le meilleur à l’équipe nationale. La fédération rappelle ainsi que les Léopards appartiennent à toute la Nation, et qu’aucune catégorie de joueurs n’a plus de légitimité qu’une autre.

Sur le plan marketing, la campagne ressemble effectivement à un pré-lancement de la nouvelle tunique des Léopards. Les indices visuels, l’appel aux commentaires, et la portée émotionnelle du message vont dans ce sens. Mais en réalité, la chronologie et le ton montrent que l’objectif dépasse l’annonce d’un maillot : calmer les tensions internes, renforcer l’unité autour de l’équipe nationale, préparer la population à accepter un groupe mixte, composé de binationaux et de locaux, replacer le débat autour du patriotisme et non des origines.
À l’heure où la RDC vise une qualification en Coupe du monde et aborde les prochaines échéances avec ambition, la FECOFA sait que la division fragilise la performance nationale. D’où cette campagne double usage : marketing, pour créer l’engouement autour du futur maillot ; politique et symbolique, pour rappeler que l’équipe nationale est un espace de fierté commune, pas un terrain de rivalités identitaires.

Avec cette communication habile, la FECOFA envoie un message fort : la sélection n’est pas une bataille entre binationaux et locaux, mais une représentation du meilleur du football congolais, dans toutes ses composantes. Le maillot, lui, n’est pas un simple tissu. Il est un héritage, un symbole, un lien vivant qui unit une nation entière derrière les Léopards.
Junior Kulele


