Un déploiement militaire massif s’opère dans l’Est de la République Démocratique du Congo. Plus de 7 000 militaires des Forces Armées de la RDC (FARDC), appuyés par des forces alliées non encore officiellement identifiées, ont été récemment déployés à Kalemie, chef-lieu de la province du Tanganyika. Leur prochaine destination : Uvira, dans le Sud-Kivu, à proximité de la frontière avec le Rwanda et le Burundi.

Ce mouvement stratégique soulève de nombreuses interrogations : s’agit-il du prélude à une contre-offensive d’envergure destinée à reconquérir les villes de Bukavu et Goma, sous la menace ou le contrôle effectif du M23-AFC et de ses alliés rwandais, les Forces de Défense du Rwanda (RDF) ?
Le déploiement via Kalemie, au sud du théâtre des opérations, représente une alternative logistique à la voie classique par le Nord-Kivu, devenue dangereusement compromise. La zone d’Uvira-Fizi, longtemps instable, sert désormais de base arrière pour le regroupement des troupes et le lancement d’éventuelles opérations militaires vers les Hauts-Plateaux et l’axe Bukavu–Goma.
Selon des sources militaires congolaises anonymes citées par RFI et TV5 Monde, ces mouvements s’inscrivent dans un plan de reconquête graduelle visant à repousser les positions avancées du M23, qui s’est renforcé militairement ces derniers mois, malgré les pressions diplomatiques.
Sur le terrain, le M23-AFC, accusé d’être soutenu logistique et militairement par le Rwanda, selon plusieurs rapports de l’ONU et de groupes de défense des droits humains, ne relâche pas la pression. Ses troupes poursuivent leur réorganisation, renforcent leurs positions dans le Rutshuru, Masisi et les abords de Sake, tout en multipliant les incursions vers le Sud.
Dans un communiqué diffusé récemment, la coalition M23-AFC-RDF a dénoncé le « déploiement massif de l’arsenal de guerre par les FARDC » sur plusieurs fronts, et appelle la communauté internationale à une médiation urgente, sous peine d’un retour à une guerre à grande échelle.
Face à une situation sécuritaire qui se dégrade, les autorités congolaises semblent déterminées à reprendre le contrôle de l’initiative militaire. Le président Félix Tshisekedi, qui s’est récemment exprimé devant les gouverneurs des provinces, a insisté sur la nécessité de restaurer l’autorité de l’État dans toutes les zones occupées.
Le déploiement à Kalemie s’inscrit aussi dans une dynamique plus large de restructuration de l’armée congolaise, avec le soutien de certains partenaires africains et étrangers (notamment l’Angola, l’Afrique du Sud, et des conseillers militaires européens dans le cadre des coopérations bilatérales).
Ce regain de tension intervient dans un contexte où les efforts diplomatiques régionaux restent en échec, malgré les tentatives de médiation de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) et de la SADC. Le Processus de Luanda, censé mener à un cessez-le-feu durable et au retrait des troupes étrangères, ne s’est pas matérialisé sur le terrain. Les yeux sont désormais braqués sur Doha où reposent l’espoir d’une paix souhaitée.
Pour de nombreux analystes, le redéploiement militaire actuel pourrait constituer un tournant décisif dans le conflit, soit en amorçant une véritable reprise militaire des villes occupées, soit en provoquant une nouvelle escalade régionale.
Alors que les populations civiles continuent de fuir les zones de conflit – avec plus de 2,8 millions de déplacés internes dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, selon l’OCHA – l’issue de cette potentielle contre-offensive militaire reste incertaine. Mais une chose est sûre : Kinshasa se prépare. Et face à la menace persistante du M23, le statu quo n’est plus une option.
La rédaction de b-onetv.cd