Plus de dix jours après l’expiration du moratoire fixé par le gouvernement pour le début des contrôles du nouveau permis de conduire biométrique sécurisé avec puce, aucune opération de vérification n’est encore visible sur les routes du pays. Le délai, annoncé début mars par le vice-premier ministre en charge des Transports, Jean-Pierre Bemba, avait pourtant pris fin le 30 juin 2025, sans prolongation officielle.
Dans les rues de Kinshasa comme dans d’autres grandes villes, la circulation se poursuit dans un désordre routinier, sans aucun signe de mise en œuvre de cette mesure censée renforcer la sécurité routière et réduire le nombre d’accidents.
Lors du lancement du nouveau permis en novembre 2024, le ministre Jean-Pierre Bemba avait souligné l’importance de ce document pour moderniser le secteur des transports, lutter contre la fraude et renforcer le respect du Code de la route. Mais depuis la fin du moratoire, le silence est total.
Contacté à ce sujet, le ministre provincial des Transports de Kinshasa botte en touche : « C’est une affaire gérée au niveau national », a-t-il simplement déclaré, sans fournir de calendrier ni d’explication sur l’absence de contrôles.
D’après une source au sein du ministère national des Transports, le moratoire aurait davantage servi de levier psychologique que d’instruction contraignante : « C’était une mesure de pression pour inciter les conducteurs à se conformer à la réforme. Mais il n’y avait pas de dispositif sérieux prévu pour lancer les contrôles à échéance. »
La même source évoque également un engouement très faible à la Commission Nationale de Délivrance de Permis de Conduire (CONADEP), principalement en raison du coût élevé du nouveau permis.
Fixés par la Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participation (DGRAD), les frais pour l’obtention du nouveau permis varient selon les catégories :
Catégorie A (motos et tricycles) : 38,5 USD
15,4 USD au Trésor public
23,1 USD à la Société de Permis de Conduire (SPC SAU)
Catégorie B (véhicules légers ≤ 3,5 T) : 71,5 USD
28,6 USD au Trésor
42,9 USD à la SPC SAU
Catégories C, D, E (poids lourds > 3,5 T) : 99 USD
39,6 USD au Trésor
59,4 USD à la SPC SAU
Ces montants sont jugés excessifs par une large frange des usagers, notamment les chauffeurs de transports en commun, qui ne se présentent presque jamais à la CONADEP, selon un cadre de la direction des Transports.
Alors que seuls quelques propriétaires de véhicules privés et chauffeurs d’entreprises entament les démarches, la majorité des conducteurs, en particulier ceux du secteur informel, restent à l’écart. En l’absence de contrôles concrets, la réforme risque de perdre toute efficacité, malgré les avancées technologiques qu’elle représente en matière de lutte contre les faux permis et de traçabilité des conducteurs.
Le gouvernement congolais devra désormais trancher : relancer la campagne de sensibilisation et de contrôle, ou revoir les coûts et modalités d’accès à ce document essentiel. En attendant, la circulation continue comme si de rien n’était — entre flou administratif, désorganisation structurelle et résignation populaire.
La rédaction de b-onetv.cd


