La commission électorale nationale indépendante (CENI) vient de convoquer, ce vendredi 01 septembre 2023, l’électorat pour l’élection du Président de la République qui se tiendra en décembre 2023. Pendant ce temps, deux acteurs majeurs de la vie politique de la République démocratique du Congo (RDC) sont aujourd’hui à côté du processus électoral en cours.
Il s’agit d’un côté de Lamuka, ce regroupement politique de l’opposition avec à sa tête Martin Fayulu candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2018 (34, 83%), ayant arrivé à la 2e position après Tshisekedi (38,57). Le président de l’ECIDé, lui et sa plateforme Lamuka, n’ont pas participé à l’opération de dépôt des dossiers de candidatures pour la députation nationale, provinciale mais aussi pour l’élection municipale. De l’autre côté le Front commun pour Congo (FCC). Cette famille politique de Joseph Kabila, Président de la République honoraire (2001-2018) qui a aligné comme candidat président en 2018 Emmanuel Ramazani arrivé en 3e position(23, 84%). Le FCC n’a même pas participé à l’opération d’enrôlement d’électeurs, se disant ne pas être concerné par ce scrutin.
Mobile et enjeu d’une absence de fait au processus
Il faut dire les deux parties prenantes au processus, Lamuka et FCC, ont réfuté pratiquement l’idée de prendre part au processus pour des raisons qui sont diverses. Lamuka de Martin Fayulu veut un autre audit du fichier électoral, car selon lui, ce qui était fait en juin avec les 5 experts recrutés par la CENI, après que l’organisation Internationale de la Francophonie (OIF) puisse décliner l’offre, n’est pas fiable. Pour le camp Fayulu cet audit doit se réaliser par un cabinet spécialisé dont la compétence est reconnue à l’international.
Si le FCC se dit pas interressé à ce processus, c’est parcqu’il solicite entre autres la recomposition de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), l’autorité publique organisatrice des élections, mais aussi la recomposition de l’actuelle équipe de la Cour constitutionnelle, cette instance qui donne les résultats définitifs des élections après traitement des contentieux. Des revendications qui sont légitimes dans les deux cas, mais il y a un facteur temps qu’il faut aussi prendre en compte.
Pour ce qui est du nouvel audit du fichier, la CENI indique qu »il est impossible d’y revenir, car les arguments poussés par l’opposition ne sont pas solides et que l’audit du fichier n’est pas une exigence légale. Ce n’est qu’un élément de la stratégie de l’équipe de la centrale électorale. Il y a aussi le risque que le délai constitutionnel soit entamé, car, dès le départ, l’équipe Kadima disait que le glissement n’est pas dans son vocabulaire. Il serait également impossible de reprendre un processus de recomposition de la CENI et de la Haute Cour. Parce que, selon les instances qui concourent à la mise en place des animateurs politiques de ces deux institutions, tout était fait selon les règles de l’art. Encore qu’il faut considérer le fait que les résolutions au parlement sont prises par la majorité.
Au regard de ce qui précède l’enjeu ou les enjeux sont simple. D’un côté, il y a la crédibilité du 4e cycle électoral qui serait entamée, parce que le principe de l’inclusivité du processus électoral subit déjà un coup fatal car deux de trois grands challengers de Félix Tshisekedi en 2018 se sont auto-exclus pour manque de confiance aux acteurs publics des élections. De l’autre côté il y a aussi le fait que ces deux familles politiques se verront affaiblis. La force d’une formation politique réside aussi dans sa représentativité dans les institutions électives, notamment dans le parlement et les assemblées provinciales. Cette position occasionne déjà de départs de leurs députés, où des prétendants qui veulent avoir un contact permanent avec leurs bases. Une question se pose, comment sauver ces acteurs de la vie politique congolaise qui se sont exclus ?
Seul le dialogue peut sauver les absents de fait
A ce stade du processus électoral, seul le dialogue peut faire revenir les deux familles politiques, FCC et Lamuka, qui sont aujourd’hui à côté des grandes compétitions à venir. Là, il ne reste qu’un poste, la présidentielle où le dépôt des candidatures commence le 09 septembre. Mais on ne peut pas imaginer diriger le Congo sans avoir une assise dans l’une des chambres de l’Assemblée nationale ou généralement au parlement. Départ les positions et du Gouvernement et de la CENI, les élections de décembre sont irréversibles. Le Porte-parole du Gouvernement, lors du briefing du lundi 28 août, a affirmé qu’il y a aucun dialogue politique en gestation. Le seul dialogue, disait-il, c’est les élections.
Le vendredi dernier, le président de la Centrale électorale avait affirmé, lors de la convocation de l’électorat pour l’élection du Président de la République, que le respect du délai est le plus grand défi. « Le grand défi pour la CENI et pour toutes les parties prenantes au processus électoral demeure la tenue des élections dans le délai constitutionnel.» Sauf grand changement qui relèverait de l’imprévisibilité politique, ou du caractère dynamique de la vie politique, surtout congolaise, l’espoir de voir le FCC et Lamuka prendre entièrement part au 4e cycle électoral frôle le zéro. Nonobstant le délai à respecter, les politiques doivent mettre en jeu leurs intelligences pour le triomphe de la fragile démocratie en RDC.
Emille Kayomba