L’annonce d’une augmentation du solde pour les militaires et policiers de la RDC a été accueillie avec enthousiasme. Le gouvernement congolais a doublé les salaires de base et octroyé une prime spéciale de 500 dollars aux éléments en première ligne. Mais derrière cette mesure saluée se cachent de nombreuses interrogations. Ce geste suffira-t-il à redonner espoir et dignité à ceux qui défendent la nation, parfois au prix de leur vie ?
En apparence, l’intention est noble : revaloriser les hommes en uniforme, galvaniser leur moral et reconnaître les sacrifices. Mais en réalité, que représente concrètement ce doublement de solde pour un caporal de deuxième classe qui touchait à peine 100 dollars en francs congolais ? Passer à 200 dollars est-il suffisant pour affronter les réalités économiques d’un pays en crise, surtout quand on sait qu’un général ne toucherait même pas 1 000 dollars de base ?
Et puis, comment interpréter cette initiative dans un contexte de gouvernance budgétaire rigide ? Le Parlement, autorité légale en matière de finances, n’a pas prévu cette dépense dans la loi de finances adoptée en décembre dernier. Le gouvernement pouvait-il se permettre une telle décision sans approbation légale ? Est-ce une urgence de guerre qui justifie le passage en force, ou une improvisation risquée dans un pays déjà fragilisé ?
Sur le terrain, les réalités sociales des militaires et policiers posent encore plus de questions. Comment parler de revalorisation alors que de nombreuses casernes sont en ruine, privées d’eau potable, d’électricité, de soins médicaux adéquats ? Que dire de leurs familles, souvent livrées à elles-mêmes, sans accès à une éducation digne ou à des conditions de vie décentes ? Peut-on véritablement bâtir une armée forte sur des bases aussi précaires ?
L’initiative du gouvernement suffira-t-elle à enrayer les désertions, à motiver les troupes, à bâtir une armée dissuasive digne de la RDC ? Une armée capable non seulement de défendre l’intégrité territoriale, mais aussi de s’aligner aux standards modernes avec des moyens technologiques, une aviation opérationnelle, une marine équipée et une force terrestre bien entraînée ? Où en sommes-nous réellement, au-delà des discours ?
Le financement d’une telle ambition est lui-même un casse-tête. Le gouvernement affirme miser sur la réduction du train de vie des institutions, sur les emprunts et obligations, et sur l’appui des partenaires internationaux. Mais cette stratégie est-elle viable à long terme ? Peut-on garantir un budget de défense stable, dans un contexte économique aussi volatil que celui de la RDC ?
Au final, cette augmentation de solde n’est-elle qu’un pansement sur une plaie béante ? Une tentative louable, mais encore bien insuffisante ? Pourra-t-on un jour offrir à nos hommes et femmes en uniforme une vraie reconnaissance, une vraie protection, et un avenir à la hauteur de leur sacrifice ? Autant de questions ouvertes… et toujours sans réponse claire.
Feza Micka