Depuis la loi du 13/005 du 15 janvier 2013, portant statut du militaire des Forces armées de la République Démocratique du Congo, un seul et même statut général des militaires s’applique aux femmes et aux hommes. Sans distinction, ils prennent part active dans la stratégie de défense et de sécurité nationale de la RDC. Les Femmes et les Hommes militaires répondent d’office au rôle traditionnel de l’Armée celui de défendre l’intégrité du territoire national face aux agressions extérieures et d’assurer la paix à l’intérieur des frontières. Qu’en est-il de l’Egalité Hommes-Femmes militaires, leurs droits et leurs devoirs sont-ils protégés et assurés au sein des Forces Armées de la RépubliqueDémocratiqueduCongo ? Pour comprendre les progrès réalisés, les défis à relever et les perspectives d’avenir sur cette question essentielle, b-onetv.cd a tendu son micro au Général de Brigade, Batabombi Apanza Jean Daniel, commandant Adjoint du Service de Communication et d’Information des Forces Armées en charge des Operations et du Renseignement et Point Focal de l’Agenda sur les Femmes, la Paix et la Sécurité au sein du Ministère de la Défense Nationale et Anciens Combattants.
B-ontv.cd : Quelle est la situation de l’Egalité hommes-femmes au sein des FARDC ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : L’égalité est l’une des valeurs fondatrices des Armées. En effet, la réforme du secteur de la défense, courageusement initiée par le Gouvernement de la RDC est en cours. Toutefois, elle a déjà permis l’atteinte de plusieurs résultats positifs. Au point de vue législatif, il est noté la promulgation de la Loi n° 13/005 du 15 Janvier 2013 portant statut du militaire des Forces armées de la République Démocratique du Congo. Elle introduit plusieurs innovations majeures notamment : la promotion et la protection du genre.
B-ontv.cd : A quand remonte la protection des droits et obligations des hommes-femmes militaires au sein des FARDC ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Depuis la promulgation de la Constitution et de manière particulière, la loi du 13/005 du 15 janvier 2013, un seul et même statut général des militaires s’applique aux femmes et aux hommes militaires : ils ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. Ainsi l’article 11 de ladite loi dispose que : « nul ne peut faire l’objet au sein de des Forces Armées des mesures discriminatoires en raison de son sexe, de sa religion, de son origine familiale, de sa condition sociale, de sa résidence, de ses opinions, de son appartenance à une race, à une ethnie, à une tribu, à une minorité culturelle ou linguistiques ». Et l’article 17 de la loi précitée renchérit que : « dans l’accomplissement de sa mission, le militaire est tenu de respecter et de protéger la dignité humaine, de défendre et de protéger les droits et liberté fondamentale de toute personne. Le militaire ne peut en aucun cas, ni infliger ou tolérer, ni justifier un acte de torture ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Il s’engage à respecter scrupuleusement, en tout temps et en tout lieu, le droit humanitaire et les instruments internationaux qui protègent les droits de la femme, de l’enfant et de toute personne vulnérable ».
L’observance de ces dispositions s’impose aux Femmes et Hommes militaires. Précisons cependant que permettre aux femmes d’accéder de façon égale avec les hommes aux postes de responsabilité à la gouvernance dans l’armée n’est ni une question catégorielle, ni une faveur des opportunités professionnelles. Cette question relève de l’intérêt général et de l’équilibre social, pour construire un avenir meilleur pour tous. D’ailleurs, lors de son discours d’investiture prononcé ce 20 janvier 2024, le Chef de l’Etat a annoncé l’autonomisation et la promotion des femmes dans notre société. A ce sujet, le Ministère de la Défense Nationale et Anciens Combattants et l’Etat-major Général des Forces Armées de la République Démocratique du Congo entendent y prendre toute leur part.
Cependant, en plus des résultats positifs obtenus grâce à certaines actions menées, des mesures prises et des mécanismes instaurés, cette ambition ne peut être possible que dans la mesure où les jeunes filles s’engagent en connaissance de cause et volontairement dans cette démarche et ce, avec l’encouragement des organisations de la société civile. Pour ce faire, l’Armée veut se doter d’une stratégie genre pour accélérer le processus. Cette stratégie comprend quatre étapes, à savoir : le lancement, qui passe par la sensibilisation du public, consultation et rédaction, révision et conciliation et enfin approbation et diffusion.
B-ontv.cd : Donnez-nous l’état des lieux de la mise en œuvre du principe de l’égalité hommes-femmes au sein des FARDC ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : En réalité, la situation actuelle connait des avancées significatives, qui ne peuvent pas pour autant occultées des défis en termes d’obstacles et certaines pesanteurs culturelles. Mais, si vous me permettez, remontons un peu dans l’histoire de nos Forces Armées. De 1885-1960, aucune femme militaire dans la Force Publique. A partir de 1966, il y a eu enrôlement de jeunes filles qui avaient échoué aux épreuves des examens d’état. En 1975, un recrutement régulier. En 1984, les premières femmes militaires accèdent au Centre Supérieur Militaire qui offre la possibilité d’être élevé au grade de Major par la promotion Ecole et l’avancement des femmes en grades supérieurs s’est poursuivi normalement jusqu’à 2008, date du lancement de la réforme de l’armée où l’on connaitra les nominations des femmes Colonelles.
B-ontv.cd : La loi du 15 janvier 2013 est très capitale pour l’égalité des femmes et hommes militaires en termes des droits et obligations ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Justement, c’est depuis la loi du 13/005 du 15 janvier 2013, qu’un seul et même statut général des militaires s’applique aux femmes et aux hommes : ils ont les mêmes droits et les mêmes devoirs, voire obligations.
B-ontv.cd : Quels sont alors les avancées dans cette égalité entre femmes et hommes militaires ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Parmi ces avancées, nous pouvons souligner qu’au sein du Ministère de la Défense Nationale et Anciens Combattants et de l’armée, les femmes militaires sont représentées dans toutes les catégories de grades et certaines participent aux organes de prise de décision.
B-ontv.cd : Citez-nous les avancées en grade et en responsabilités des femmes militaires ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Il y a des nominations de premières femmes au grade de Général de Brigade en 2013 et retraitées en 2018. Il s’agit des : Générales de Brigade Bolingo Lessere Ndu Marie, nommée à 2013 et retraitée à ce même grade ; Générale de brigade Kalanga Kapena Léonie ; Générale de Brigade Ngoie Museng Claudette (décédée) ; Générale Major Sasa Matshuela Micheline, retraitée et Générale de Brigade Bomwenda Mangoy Frédérique retraitée en 2018. Donc, il y a cinq femmes générales nommées en 2013 et 2014 et retraitées en 2018 et une décédée parmi les cinq. Il y aussi quatre femmes Générales de Brigade nommées en 2018 et élevées au grade de Générale Major et aux hautes fonctions en 2020 au sein des FARDC. Nous citons : Générale Major Kabwanga Kaseu Symphorose, Secrétaire Générale aux Anciens Combattants ; Générale Major Sheshi Mayu Justine, commandant du Corps Logistique, Générale Major Médecin Ngomo Wenenda Monique, Conseillère Spéciale Santé à l’Inspectorat Général des FARDC; Générale de Brigade Mbuyi Tshivuadi Marie José, Commandant Adjoint au Corps Logistique.
B-ontv.cd : Est-ce qu’il y a aussi des femmes militaires qui dirigent les unités dans les FARDC ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Effectivemment les FARDC comptent plus de deux cents officiers supérieurs femmes (allant de grade de Major au Colonel), parmi lesquelles des Colonelles qui ont fait le Collège des Hautes Etudes de Stratégie et de Défense (CHESD) et l’Ecole Supérieure d’Administration Militaire (ESAM) et occupent des fonctions importantes au sein des grandes unités des FARDC, nous citons notamment: Colonelle Lundundila Kiangeben Berthe (ESAM) ; Colonelle Nkulu Kankomba Agnès (Diplômée de l’Ecole d’état major) ; Mukembe Nénette (ESAM) ; Lieutenant Colonelle Zogbali Mideawi Modestine (Elle a fait l’Ecole de Guerre, elle est donc brevetée d’Etat Major ) ; Lieutenant Colonelle Monga Maloba Françoise (ESAM) ; Lieutenant Colonelle Ntumba Bitshiluala Emilie (Diplômée d’Etat Major) ; Lieutenant Colonelle Kabuya Kebene Riziki Risette (Diplômée d’Etat Major) ; Lieutenant Colonelle Likobe Ewango Doudou (Diplômée d’Etat Major, formatrice au Groupement des Ecoles Supérieures Militaires, Lieutenant-colonelle Tshilomba Odette (Diplomee d’État Major ) et Major Inatombo Wampaka Julie (Bureau comptable du service de communication et d’informations des Forces Armées (SCIFA). Il sied de relever qu’il y a deux organes de prise de décision au sein du Ministère de la Défense Nationale : le Conseil Supérieur de la Défense et le Haut Commandement Militaire. A ces jours, une seule femme, Sheshi Mayu Justine, Générale Major, commandant du Corps Logistique qui participe aux réunions du Haut Commandement Militaire.
B-ontv.cd : Mon Général, les défis sont énormes, lesquels ont été déjà relevés ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : En ce qui concerne les défis, l’on peut citer : la mauvaise perception des femmes militaires par la population civile ; le faible engagement des femmes et certaines contraintes d’organisation en interne et faible participation des jeunes filles de se faire enrôler dans l’Armée.
B-ontv.cd : Considérant les opportunités présentées ci-haut, le cadre juridique et légal, et qui sont soutenues par la volonté politique de l’Autorité du Pays, étant que point Focal au Ministère de la Défense Nationale et Anciens Combattants (MDNAC), que comptez-vous faire pour améliorer davantage cette situation, qui apparemment ne parait pas assez satisfaisante ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Je veux finaliser la rédaction du projet de la stratégie d’intégration du genre assorti d’un plan d’action pour la mise en oeuvre y compris d’un plan de communication cohérent y affèrent, qui constituera un document de référence et d’orientations. Cet outil de planification donnera une vision claire à ce sujet, avec des objectifs atteignables, réalistes et réalisables, tout en prenant en compte les défis en termes d’obstacles et en se dotant des moyens et les manières de faire. Dans ce cadre, nous sommes dans un groupe de travail (composé des points focaux genre du MDNAC et de l’Etat-major Général avec l’appui d’Enabel dans le cadre du projet Union pour la Paix et la Sécurité sous l‘autorité du Ministre de la Défense Nationale.
B-ontv.cd : Quels sont les enjeux de la mise en œuvre de la stratégie d’intégration du genre dans le secteur de la Défense ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Cette stratégie d’intégration du genre, est une nécessité pour apporter des réponses cohérentes aux défis sécuritaires et aux besoins évolutifs de la Défense Nationale. Cette action exige un effort important de conception, mais également une démarche inclusive malgré les difficultés liées au nombre et à la diversité des acteurs.
B-ontv.cd : Quel est votre mot de conclusions ?
Général de Brigade, Batabombi Apanza : Egalité hommes-femmes, un principe cardinal et une réalité quotidienne au sein du Ministère de la Défense Nationale et Anciens Combattants reste notre leit motiv de notre mission en qualité de Point focal de l’Agenda sur les Femmes, la Paix et la Sécurité. L’atteinte des objectifs est d’autant plus rassurant grâce au cadre juridique favorable à la Volonté affichée du Commandant Suprême des Forces Armées…aux considérations du Vice-premier ministre et ministre de la Défense Nationale et Anciens Combattants et surtout de la prise en compte de la question égalité Hommes et Femmes par le Général d’Armée Tshiwewe Songesa Christian, Chef d’Etat Major Général des FARDC.
J’exhorte toute la société congolaise et les organisations de la société civile en particulier de restaurer un regard positif sur la nécessité et l’utilité des femmes militaires dans la construction de la paix. Ce regard soit caractérisé par les encouragements, la considération, le respect, la reconnaissance de l’engagement particulier des femmes militaires, pour contribuer aux libertés individuelles et collectives du peuple congolais. Notre nouvelle approche : sensibiliser-recruter-fidéliser-valoriser. Donc, les métiers des armes, est un métier noble : « on y entre – on y reste et on y évolue », parce que la participation effective et accrue des femmes militaires dans tous le processus de la réforme de notre armée et à tous les niveaux renforcera davantage et certainement la performance opérationnelle.»
Propos recueillis pas Pascal B. Kambala