À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, une réflexion s’impose sur le rôle, l’influence et les limites des médias locaux en République Démocratique du Congo, particulièrement dans un contexte marqué par une crise sécuritaire persistante et des tensions politiques croissantes.
Dans une société fragilisée par les conflits, la désinformation et l’instabilité, le rôle des médias est capital : fournir une information exacte, rapide, accessible et compréhensible. Ils doivent aider les citoyens à saisir la gravité des situations, à prendre des décisions éclairées et à rester engagés dans la vie démocratique du pays. Mais encore faut-il que ces médias soient à la hauteur de cette mission.
Une indépendance financière introuvable
La problématique centrale des médias congolais demeure leur crédibilité, étroitement liée à leur indépendance financière. La majorité des organes de presse locaux sont inféodés : soit à des intérêts politiques, soit à des financements étrangers ou encore à des institutions étatiques. Dans ce paysage, les médias véritablement indépendants sont rares, presque marginaux.
Comme le dit l’adage : « Avant de croire ce que dit la presse, cherchez à savoir qui paie l’encre. » Une presse dépendante ne peut garantir ni objectivité, ni rigueur, ni impartialité. Il est donc urgent de réfléchir à un mécanisme national de subvention publique, transparent et équitable, permettant aux médias de fonctionner librement tout en rendant des comptes à la société.
Quand les médias traditionnels faiblissent, les réseaux sociaux s’imposent
La RTNC, tout comme plusieurs médias traditionnels (presse écrite, radio, télévision), n’ont pas su répondre aux exigences de la communication de crise. Par leur silence, leur frilosité ou leur alignement sur des récits officiels parfois déconnectés de la réalité, ils ont laissé le champ libre à la prolifération de fausses informations sur les réseaux sociaux, un terrain miné par la manipulation, les rumeurs et les discours de haine.
Et pourtant, dans un monde saturé de voix et de contre-voix, les médias traditionnels restent les piliers d’une information structurée et vérifiée. Ils traversent le temps, occupent une place particulière dans la vie des citoyens, et demeurent, lorsqu’ils sont bien encadrés, des remparts contre l’obscurantisme. Car comme le disait un penseur : « Sans savoir, une croyance n’éclaire pas, elle obscurcit. »
Le CSAC en perte de légitimité
Autre problème majeur : le rôle contesté du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC), censé garantir l’éthique et la régulation du secteur. Aux yeux de nombreux observateurs, le CSAC s’est mué en instrument de répression et de règlements de comptes, incohérent dans ses interventions et peu soucieux de protéger la liberté de la presse.
L’éthique journalistique en question
Enfin, au-delà des institutions, la probité de certains acteurs des médias est aussi en cause. L’absence de formation continue, le manque de déontologie et les complicités intéressées nuisent à la confiance du public. Restaurer cette confiance passe par une professionnalisation accrue, une responsabilisation des journalistes, et une volonté collective de faire des médias un outil au service de la vérité, et non des ambitions individuelles.
En ce 3 mai, la presse congolaise est appelée à un sursaut. Le pays a besoin d’un journalisme fort, indépendant, éthique, et résolument engagé dans la défense de la vérité et de l’intérêt public. Car sans presse libre et crédible, il n’y a pas de démocratie durable.
Junior Kulele