Kinshasa, mégapole d’Afrique centrale et capitale de la République démocratique du Congo, donne aujourd’hui l’image d’une ville débordée par sa propre croissance. Entre l’absence criante de planification urbaine, la dégradation généralisée des infrastructures et les conditions de vie indignes, la ville peine à dissimuler son visage de désordre permanent.

Une ville sans règles ni repères
Avec plus de 15 millions d’habitants, Kinshasa s’est étalée anarchiquement, sans véritable encadrement urbanistique. Des quartiers entiers ont émergé sans voir ni route digne de ce nom, ni système d’assainissement. Les maisons côtoient les ravins, les constructions grimpent sans permis, et les canalisations inexistantes laissent les eaux usées serpenter à ciel ouvert.
Chaque saison des pluies ravive le même cauchemar : des quartiers inondés, des routes impraticables, des habitations emportées par l’érosion. Dans les collines de Ngaliema, de Mont-Ngafula ou encore dans certaines parties de Masina, des glissements de terrain font chaque année des victimes.
Les déchets : un fléau omniprésent
Partout dans la ville, les déchets jonchent les rues. Les immondices s’accumulent dans les marchés, les cours d’école, les coins de rue. L’absence de politique efficace de collecte transforme Kinshasa en une immense décharge à ciel ouvert. Des enfants fouillent dans les tas d’ordures, tandis que les mouches et les odeurs pestilentielles rappellent le drame sanitaire que cela représente.

Les rivières, comme la Kalamu ou la Makelele, sont devenues des canaux de pollution, charriant plastiques, carcasses d’animaux et eaux usées jusqu’au fleuve Congo.
Une mobilité urbaine asphyxiée
À Kinshasa, se déplacer relève souvent du parcours du combattant. Il n’existe pratiquement pas d’autoroutes, les routes principales sont défoncées, truffées de nids-de-poule parfois si profonds qu’ils causent des accidents. L’absence d’arrêts de bus formalisés, de couloirs de circulation ou même de trottoirs pour les piétons ajoute à la confusion.

Les embouteillages sont quotidiens, interminables et coûteux. De Limete à la Gombe, de Matete à Kintambo, les véhicules s’entassent dans une cacophonie de klaxons. Aucune signalisation, pas de feux de circulation fonctionnels, et un réseau de transport public quasi inexistant : les Kinois dépendent de taxis-bus surchargés et vétustes.
Un besoin criant de réforme et de volonté politique
Kinshasa paie aujourd’hui le prix de décennies de négligence, d’absence de vision et de gouvernance urbaine. Sans un plan directeur d’aménagement clair, sans investissements massifs dans les infrastructures et sans politiques publiques ambitieuses pour l’assainissement, la ville court à la catastrophe écologique, sociale et sanitaire.
Pourtant, Kinshasa regorge de potentiels. Une jeunesse dynamique, une richesse culturelle unique, un fleuve majestueux… Mais tant que l’ordre urbain ne remplacera pas le chaos, la capitale congolaise restera l’illustration parfaite d’un développement sans direction.
Kinshasa mérite mieux. Ses habitants aussi.
Feza Micka