L’annonce récente du gouvernement congolais de l’ouverture de poursuites judiciaires contre l’ancien président de la République, Joseph Kabila Kabange, continue de faire des vagues dans l’opinion publique nationale. Alors que des mesures fortes ont été prises à son encontre, notamment l’interdiction du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD) d’opérer sur le sol congolais, la société civile s’exprime à son tour.
Dans un communiqué rendu public ce lundi, l’Observatoire de la Dépense Publique (ODEP), organisation de la société civile dirigée par le professeur Florimond Muteba, a appelé les institutions à observer avec rigueur les principes fondamentaux de l’État de droit, à savoir la présomption d’innocence, la séparation des pouvoirs et le respect strict des procédures judiciaires.
« L’ODEP rappelle que toute poursuite judiciaire doit être conduite par les juridictions compétentes, dans le respect strict des règles de procédure, de la présomption d’innocence et de l’indépendance de la justice. La démocratie ne saurait tolérer que la justice serve de champ de règlement des comptes politiques ou de représailles institutionnelles », peut-on lire dans le document.
La semaine écoulée a été marquée par l’annonce controversée du retour de Joseph Kabila au pays, notamment dans la ville de Goma, sous occupation partielle du M23/AFC. Toutefois, aucune preuve irréfutable de sa présence n’a pu être apportée, malgré l’agitation provoquée sur les réseaux sociaux et dans certains médias locaux.
Dans la foulée, le gouvernement a ordonné la saisie des biens mobiliers et immobiliers de l’ancien président et l’interdiction d’activités du PPRD, son ancien parti, accusant Joseph Kabila d’ambiguïté face à la situation sécuritaire qui prévaut dans l’est du pays. Tout en affirmant ne pas prendre position pour l’ancien chef d’État, l’ODEP condamne les dérives politiques et médiatiques constatées autour de cette affaire.
« Il est inacceptable, dans un État de droit, que des accusations aussi graves soient exposées sur la place publique en dehors de tout cadre judiciaire régulier, au mépris des droits garantis à tout citoyen et compris à un ancien Chef d’État », affirme encore l’organisation.
L’ODEP insiste enfin que la lutte contre l’impunité ne saurait se faire au détriment des garanties constitutionnelles et appelle à une instruction sérieuse, indépendante et conforme à la loi, sans instrumentalisation des institutions à des fins partisanes.
Alors que le climat politique reste tendu, cette prise de position relance le débat sur l’équilibre entre justice et respect des droits dans une démocratie fragile, tout en posant la question : l’affaire Kabila marquera-t-elle un tournant historique ou un précédent politique risqué pour la RDC ?
Emille Kayomba