Lors du segment de haut niveau de la 58ᵉ session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève, la Première ministre congolaise, Judith Suminwa, a mis à profit cette tribune pour alerter la communauté internationale sur la gravité de la situation dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Face aux récentes offensives du M23, soutenu par le Rwanda, elle a condamné les violences, les massacres et les exactions perpétrées contre les populations civiles.
Elle a réitéré l’engagement du gouvernement congolais à soutenir les enquêtes indépendantes des Nations-Unies afin de documenter les violations des droits humains et du droit international humanitaire dans cette région meurtrie. Dans cette dynamique, Kinshasa entend faciliter le travail de la commission d’enquête, un geste perçu comme une volonté d’établir les responsabilités et d’obtenir justice pour les victimes.
Depuis le début de l’année 2025, plus de 7 000 personnes ont perdu la vie dans les violences qui secouent le Nord-Kivu et l’Ituri. Des villages entiers ont été rasés, des familles déplacées et des milliers de Congolais vivent dans une précarité extrême. L’occupation de Goma par les rebelles du M23 a accentué l’insécurité et les exécutions sommaires.
Un cas emblématique de cette répression a été l’assassinat du musicien Delcat Idigo, abattu alors qu’il tournait un clip dénonçant l’occupation rwandaise. Moins d’une semaine après, 11 jeunes ont été exécutés froidement dans un quartier de Goma, un acte qui a exacerbé la colère et le rejet de l’occupation.
Le chiffre des victimes de la guerre en RDC dépasse désormais les 8 millions de morts, une tragédie qui semble avoir été ignorée par la communauté internationale pendant des décennies. Toutefois, la donne semble changer, avec des condamnations explicites contre le Rwanda et des sanctions visant certains acteurs impliqués dans l’entretien de cette guerre.
L’arrivée à Kinshasa de Karim Khan, procureur de la Cour pénale internationale (CPI), marque une avancée significative dans la quête de justice. Son séjour vise à renforcer les échanges et les enquêtes sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis dans l’Est du pays. Déjà, son institution recueille des témoignages et des preuves sur les atrocités en cours, avec la garantie du soutien total des autorités congolaises.
Bukavu est devenue une ville sous tension, depuis sa prise, elle se réveille quotidiennement dans un climat de peur et d’angoisse. Dans ce contexte, une fusillade de plusieurs jeunes innocents par les forces du M23 a fait état d’un bilan provisoire de 5 morts et plusieurs blessés. La population, paralysée par la psychose, n’ose plus sortir de chez elle, tandis que les soldats rwandais du M23 patrouillent dans la ville.
Cette présence hostile dans les rues rappelle le lourd tribut payé par les populations locales, qui continuent de subir les affres d’un conflit sans fin. Le traumatisme collectif s’intensifie, et l’absence de réactions concrètes de la communauté internationale ne fait qu’accentuer la frustration et le désespoir. La barbarie a encore frappé Goma avec l’incendie volontaire d’une boîte de nuit bien connue située dans le quartier Don Bosco. Les militaires rwandais et les rebelles du M23 ont incendié l’établissement sous prétexte qu’il abritait des voleurs.
Selon des témoignages accablants, plus de 200 personnes ont péri dans ce drame. Parmi les victimes, des clients, des serveurs et le personnel du bar. Un acte criminel d’une brutalité inouïe, qui a plongé Goma dans le deuil et la colère. Alors que les appels à des sanctions plus sévères contre le Rwanda se multiplient, les récents massacres et exactions commis dans l’Est de la RDC viennent réveiller la conscience mondiale sur un conflit souvent éclipsé par d’autres crises internationales.
L’implication de la CPI, la pression croissante sur Kigali et les dénonciations internationales sont autant de signaux d’un changement de paradigme. Toutefois, la situation sur le terrain reste désespérée pour les populations locales, qui continuent de subir des atrocités quotidiennes. Les jours à venir seront cruciaux : la RDC attend des actions concrètes de la part de la communauté internationale. Mais pour l’heure, la population congolaise n’a d’autre choix que de résister et d’espérer que la justice finira par triompher.
Junior Kulele