La Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) a exprimé, ce week-end, son indignation profonde face à la décision de la Haute Cour militaire condamnant à mort l’ancien président Joseph Kabila Kabange. Dans un communiqué signé par son président, Mgr Fulgence Muteba, la CENCO se di » par ce verdict qu’elle qualifie d’incompatible avec la sacralité de la vie humaine, tout en exhortant les acteurs politiques congolais à ouvrir un dialogue national inclusif pour éviter un nouvel embrasement du pays.
Le verdict rendu par la Haute Cour militaire de Kinshasa a fait l’effet d’une déflagration politique. Reconnu coupable de crimes de guerre, de meurtres, de viols, de torture, de complot et de soutien au terrorisme, l’ancien Chef de l’État quatrième président de l’histoire de la RDC a été condamné à la peine de mort, assortie d’une amende de 29 milliards de dollars à verser à l’État congolais, ainsi que 2 milliards à chacune des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
La Cour a également ordonné son arrestation immédiate, tout en précisant qu’aucune saisie de ses biens ne serait effectuée. Le procès, ouvert en juillet, s’est déroulé en l’absence de M. Kabila, qui n’a ni comparu ni mandaté d’avocat. Son parti, le PPRD, a dénoncé « un procès politique destiné à écarter un adversaire ».Pour la CENCO, ce verdict représente une atteinte grave à la dignité humaine et aux valeurs évangéliques. « Conscients que la peine de mort et sa logique de rétribution ne sont pas compatibles avec l’Évangile, nous sommes horrifiés par ce verdict expéditif », déclare le communiqué des évêques.
Les prélats rappellent que la Constitution congolaise garantit la sacralité de la vie humaine et que l’Église, fidèle à sa mission spirituelle, se tient à distance de tout système politique, tout en demeurant « la sauvegarde du caractère transcendant de la personne humaine ».
Au-delà de la condamnation morale de la peine capitale, les évêques mettent en garde contre les risques de division nationale que cette décision pourrait accentuer. Dans un contexte de guerre et de tensions internes, la CENCO plaide pour la convocation urgente d’un dialogue national inclusif afin de désamorcer la crise politique et sécuritaire. « Nous réitérons notre appel aux acteurs épris d’amour et de paix pour la RDC à chercher des solutions politiques. Seul un dialogue sincère peut restaurer la confiance, la paix et l’unité du pays », souligne la déclaration.
Les évêques insistent également sur la nécessité de respecter les accords déjà signés entre les différentes parties, condition indispensable à la reconstruction d’une paix durable. Cette affaire judiciaire survient alors que la situation sécuritaire se dégrade à l’Est du pays, où la rébellion du M23/AFC, soutenue par le Rwanda, contrôle plusieurs zones stratégiques. Pour la CENCO, la tentation de régler les crises par la force des armes est « suicidaire et irresponsable ».
« L’illusion qu’une paix juste peut être obtenue par la force des armes est dangereuse. Nous exhortons les gouvernants, l’opposition et la société civile à s’unir contre les causes profondes de la culture de la mort et du risque de balkanisation », avertissent les évêques.
Alors que le pays s’enfonce dans une crise politique et sécuritaire sans précédent, la prise de position de la CENCO relance le débat sur la place de la justice dans la consolidation de la paix. Si la condamnation de Joseph Kabila divise, elle met surtout en lumière la fragilité du tissu national et la nécessité de repenser les mécanismes de règlement des différends dans un esprit de réconciliation.
Pour de nombreux observateurs, la balle est désormais dans le camp du gouvernement : choisir la voie de l’apaisement ou celle de la confrontation. Et comme le rappelle la CENCO, « le pardon et le dialogue sont les seules armes capables de reconstruire durablement la Nation congolaise ».
La rédaction de b-onetv.cd


