Le jeudi 22 mai 2025 restera comme une date marquante dans l’histoire politique de la République Démocratique du Congo. Le Sénat a officiellement approuvé la levée des immunités de Joseph Kabila, ancien président de la République et sénateur à vie, ouvrant ainsi la voie à des poursuites judiciaires à son encontre.
Sur les 96 sénateurs présents lors de cette séance plénière au Palais du Peuple à Kinshasa, 88 ont voté en faveur de la levée, 5 contre, tandis que 3 bulletins ont été déclarés nuls. Aucun sénateur ne s’est abstenu. Cette décision fait suite à l’examen du rapport de la commission spéciale mise en place pour évaluer le réquisitoire adressé par l’auditeur général des FARDC, qui accuse Kabila de faits d’une extrême gravité.
Des accusations explosives et un contexte sécuritaire tendu
Le rapport remis aux sénateurs présente une série d’accusations formulées par la justice militaire : trahison, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et participation à un mouvement insurrectionnel, en lien avec un soutien présumé à la rébellion du M23, active dans l’est du pays et appuyée par le Rwanda. Ces éléments ont pesé lourd dans le vote des élus, malgré les réserves de certains parlementaires sur les risques politiques d’une telle décision.
La RDC est actuellement confrontée à une recrudescence de violences dans les provinces orientales, notamment au Nord-Kivu, où le M23 continue de défier l’autorité de l’État. Dans ce contexte, la décision du Sénat revêt un caractère hautement symbolique, traduisant une volonté du pouvoir en place d’affirmer l’autorité de la justice, y compris à l’encontre des anciens dirigeants.
Un vote contesté et des divisions politiques latentes
Bien que la majorité présidentielle détienne le contrôle du Sénat, le processus n’a pas fait l’unanimité. Certains sénateurs ont plaidé pour un traitement du dossier en Congrès, arguant que la nature exceptionnelle de la décision méritait un cadre élargi. D’autres ont exprimé leurs craintes quant à une instabilité accrue dans le pays.
L’absence de Joseph Kabila lors de cette plénière n’a pas empêché ses alliés politiques de dénoncer ce qu’ils qualifient de « règlement de comptes politique ». Le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), qu’il dirige, a rapidement réagi, qualifiant la levée des immunités de « chasse aux sorcières » et appelant à une mobilisation pour défendre leur leader.
Une procédure judiciaire inédite à venir
Avec cette décision, la Haute Cour Militaire est désormais autorisée à entamer des poursuites contre Joseph Kabila, président de la République de 2001 à 2019. Toutefois, celui-ci, qui aurait quitté la RDC en 2023 pour s’établir à l’étranger, ne s’est pas encore exprimé publiquement.
Cette affaire soulève des interrogations majeures sur la suite du processus judiciaire, les éventuelles conséquences sur la cohésion nationale, et l’avenir du climat politique dans un pays encore marqué par des décennies de conflits, de transitions incertaines et de rapports de force institutionnels complexes.
Alors que certains saluent un pas important vers la redevabilité des dirigeants, d’autres y voient le début d’un bras de fer dont les répercussions pourraient se faire sentir bien au-delà des bancs du Sénat.
La rédaction de b-onetv.cd