Ville cosmopolite, Kinshasa a dans ses travers ce sempiternel casse-tête de circulation routière et de mobilité. Choper régulièrement un moyen de transport est un traditionnel exercice d’endurance et de patience. Et le matin du lundi 13 mars ça l’était encore un peu plus, difficile ce jour là pour plusieurs habitants de la capitale de se mouvoir allègrement, massés dans les arrêts en quête d’une locomotion.

Mécontents de la hausse du tarif des prix des courses du taxi, les conducteurs de taxi et taxis bus ont séché la route pour exprimer leur desaprobation contre ce tarif du transport en commun publié par l’hôtel de ville de Kinshasa. Conséquences, plusieurs personnes ont pris du retard au travail ou à l’école pour les écoliers, d’autres ont carrément rebroussé chemin après des longues heures d’attente. Quelles sont les vraies raisons de cette énième colère des transporteurs en commun à Kinshasa ?
A la base, c’est une question de nouvelle tarification officielle des prix des trajets jugée inadaptée par l’ACCO – association des chauffeurs du Congo. Pour les coins régulièrement fréquentés, les nouveaux prix de courses varient entre 700 et 1500 francs congolais. Pourtant, plus de 5 années auparavant, les mêmes trajets ont coûté 500 francs congolais pour les lignes Victoire – UPN ou UPN – Gare Centrale, mais aujourd’hui, ces itinéraires se négocient au marché parallèle à 1000 francs, voir le double pendant les heures de pointe.
La vraie raison se cache derrière le prix du carburant, qui a augmenté 3 fois de suite dans moins d’une année, l’ACCO s’attendait normalement à la variation des tickets de taxis et taxis bus, conséquemment aux dépenses à la pompe. En plus, le syndicat des chauffeurs estime que cette décision a été prise unilatéralement par l’hôtel de Ville, sans l’en avoir associé, étant partenaire sectorielle habituelle.

Du monde dans les arrêts, c’est le spectacle que nous offre chaque jour Kinshasa. Le matin sur les grandes artères des quartiers et en début d’après midi jusqu’en fin de la journée, au centre-ville, les abords du grand marché, aussi dans les rond-points Magasin, victoire et Ngaba. Kinshasa c’est aussi un réseau de trafic avec plus de 20 lignes aujourd’hui. Les principaux terminus sont la Gare Centrale, Mbudi, UPN, Kasangulu, Rond-point Campus de l’Unikin, Lemba, Kisenso, Kinkole, Kingasani, Kingabwa, Rond-point Victoire victoire et Selembao. Situés dans les communes et quartiers à forte concentration populaire, ces coins de la capitale sont pris d’assaut au quotidien par une population dynamique, dévouée et motivée pour assurer sa survie dans les activités diverses installées pour la plupart au centre-ville. Ce qui fait que chaque matin, plus de la moitié de personnes qui travaillent convergent vers le centre des affaires qui est la Gombe et le soir, la même vague des personnes reprend dans le sens contraire.
Ces scènes relancent le débat sur la gouvernance du domaine particulier des transports en commun et de la mobilité de la population dans la mégalopole. La société TRANSCO est le seul opérateur public de transport urbain qui peine à survivre de ses propres failles conjoncturelles. Charroi automobile moins amorti et vieillissant, personnel impayé et démotivé, cet établissement créé en janvier 2013 par le gouvernement n’est pas dans les conditions de satisfaire à la responsabilité de transporter une population aussi mouvante et abondante.

Kinshasa est restée l’une des rares capitales africaines où l’on se bouscule pour prendre place à bord d’un bus ou taxi. Quand les autres pays sont passés au tramway et au train à grande vitesse, Kinshasa est d’ailleurs en voie d’hypothèquer son réseau ferroviaire qui a fait le beau temps. Pourtant longtemps, Léopoldville pouvait compter avec son réseau de train urbain qui desservait les quelques communes phares de la capitale, une fierté qui a vite tourné au drame autour des années quatre-vingt dix. Aujourd’hui le train et son chemin de fer est en faillite, avec lui l’ex Onatra – Office National des Transports, devenu une épine au pied de son principal actionnaire l’État congolais.

Comment alors résoudre les problèmes de transport dans la ville de Kinshasa ? Selon les urbanistes, ça passe d’abord par le réaménagement de l’architecture urbanistique de la ville et l’adaptation des routes à la démographie d’une agglomération qui s’étend du jour le jour. Créer en suite des véritables entreprises de transport urbain publique, et encourager les initiatives privées. Et enfin, Former des transporteurs – chauffeurs employés du secteur de transport en commun, conformément aux normes de conduite et de sécurité routières standards.
Sans une vision claire pour faciliter le déplacement dans la ville, la population le paiera toujours au plus fort. Entre temps, les chauffeurs des bus dits ESPRIT DE MORT et les taxis-motos qui ont envahi nos routes, eux qui fonctionnent sans référentiel, continueront à faire la loi avec leur façon arbitraire de conduire les vies humaines.
Constantin Ntambwe