La situation sécuritaire dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC) continue de se détériorer, poussant la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) à convoquer un sommet virtuel extraordinaire sous la présidence de William Ruto. L’objectif principal de cette rencontre était d’appeler à un cessez-le-feu « immédiat et inconditionnel » et d’exhorter le gouvernement congolais à engager un dialogue direct avec toutes les parties prenantes, y compris le groupe rebelle M23. Cette initiative intervient après la prise de la ville de Goma par les combattants du M23, un mouvement soutenu par l’armée rwandaise selon Kinshasa.
Toutefois, l’absence du Président Félix Tshisekedi à ce sommet, officiellement pour des « raisons d’agenda », a marqué les esprits. De son côté, le Président rwandais Paul Kagame a bel et bien participé aux discussions, malgré les tensions persistantes entre Kigali et Kinshasa.
En réaction aux résolutions du sommet, le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya, a critiqué la position des États membres de l’EAC, dénonçant une attitude qu’il qualifie d’ »hypocrite« . « Si vous voulez connaître la vraie définition de l’hypocrisie, c’est l’attitude de ces États-là, membres de l’EAC, qui connaissent très bien le mal mais n’arrivent pas à le nommer ou le citer », a-t-il déclaré lors d’un point de presse tenu le samedi 1ᵉʳ février.
Il a rappelé que l’intégration de la RDC à l’EAC avait été motivée par la promesse d’un processus politique clair pour traiter la question des groupes armés actifs dans la région. Selon lui, la feuille de route initiale issue du processus de Nairobi prévoyait deux axes : un dialogue politique avec les groupes armés et, en dernier recours, l’usage de la force contre les réfractaires.
Patrick Muyaya a également souligné l’incohérence des pays de la région qui insistent pour que Kinshasa dialogue avec le M23, alors que Kigali refuse de s’engager avec les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé rwandais opérant en RDC. « Nous parlons de dialogue avec les groupes armés. C’était aussi l’une des recommandations faites aux Rwandais parce qu’ils ne font que du bruit chez nous. Les FDLR dont ils parlent sont des Rwandais. Pourquoi ne font-ils pas appel à eux pour dialoguer ? » a-t-il ajouté.
Le gouvernement congolais ne rejette pas totalement l’idée du dialogue, mais insiste sur la nécessité de s’inscrire dans un cadre organisé. « Jamais nous n’avons refusé l’idée d’un dialogue, c’est pourquoi nous avons le processus de Nairobi avec le président Uhuru Kenyatta, » a affirmé Patrick Muyaya.
Il rappelle que le processus de Luanda, conduit par l’Angola, avait été conçu pour normaliser les relations entre la RDC et le Rwanda. Selon lui, la réunion du 15 décembre dernier en présence d’Uhuru Kenyatta devait justement permettre de clarifier les prochaines étapes du dialogue avec les groupes armés, y compris le M23. « Si à Luanda Paul Kagame n’était pas venu, c’est parce qu’il avait dit avant de signer tout accord : ‘Terminez d’abord avec nos supplétifs’. Nous aussi, nous avons dit ‘jamais’, » a-t-il insisté.
Alors que la communauté internationale et les pays de la région poussent pour une reprise du dialogue, la situation reste bloquée. L’annulation de la réunion tripartite de Luanda a aggravé les tensions, notamment parce que Kinshasa reste attachée au processus, tandis que Paul Kagame s’en distancie en critiquant la médiation angolaise.
Dans ce contexte d’impasse diplomatique et de violences croissantes dans l’est de la RDC, l’appel de l’EAC à un cessez-le-feu et à des négociations directes risque de rester lettre morte. Kinshasa campe sur sa position et refuse toute concession qui légitimerait le M23, tandis que Kigali maintient sa ligne dure face aux accusations de soutien à la rébellion.
La question centrale reste donc entière : le processus de paix peut-il encore aboutir alors que les positions des acteurs impliqués semblent irréconciliables ?
La rédaction de b-onetv.cd