Bien que sa présence ait été annoncée, le président Félix Tshisekedi a finalement choisi de déléguer la Première ministre, Judith Suminwa, pour le représenter au sommet conjoint des chefs d’État et de gouvernement de la SADC et de l’EAC, tenu samedi à Dar es Salaam. De son côté, il a suivi de près les conclusions de cette rencontre, précédée par les travaux de la réunion conjointe du Conseil des ministres des deux organisations.
Lors de ce sommet, le Conseil des ministres a formulé des recommandations réparties en trois catégories : à appliquer immédiatement, à moyen terme et à long terme. Parmi les mesures immédiates figuraient la cessation des hostilités et un cessez-le-feu inconditionnel, la réouverture de l’aéroport de Goma, la mise en œuvre des mesures de confiance entre acteurs étatiques et non étatiques, ainsi que l’engagement à respecter l’intégrité territoriale de la RDC et de ses voisins.
Cependant, pour de nombreux observateurs, la solution ne viendra pas uniquement de l’extérieur. Le rôle des forces internes reste déterminant. C’est dans cette dynamique que l’Église catholique et l’Église du Christ au Congo (ECC) ont décidé de s’impliquer activement. Elles ont sollicité et obtenu une audience avec le président Félix Tshisekedi afin de lui présenter leur projet : le Pacte social pour la paix et le bien-vivre ensemble en RDC et dans la région des Grands Lacs. Après cette rencontre avec le Chef de l’État, ces leaders religieux ont poursuivi leurs consultations en échangeant avec plusieurs figures politiques. Lors d’un point de presse, ils ont clarifié les objectifs de leur démarche, qui a également impliqué les Églises de réveil.
Toutefois, cette initiative suscite des interrogations. Représente-t-elle un véritable projet de réconciliation ou simplement un nouvel épisode dans le jeu politique congolais ? Difficile de répondre à cette question. L’histoire montre que la CENCO, en particulier, n’en est pas à sa première tentative d’intervention dans les affaires nationales. Déjà, au sortir de la guerre froide, l’Église avait joué un rôle majeur dans la Conférence nationale souveraine, présidée par Laurent Monsengwo, un prélat influent. Cette initiative, qui incarnait les aspirations populaires à une transition démocratique, s’était cependant heurtée aux manœuvres politiques.
L’Église s’est également illustrée en 2016 en prenant part aux manifestations contre un éventuel troisième mandat de Joseph Kabila. Son implication avait pesé dans la balance et contribué à freiner les velléités de prolongation du pouvoir. Son rôle fut aussi déterminant dans la conclusion de l’accord de la Saint-Sylvestre, réunissant majorité, opposition et société civile pour fixer les bases des élections de 2018.
Cependant, ces initiatives ont souvent conduit à des compromis politiques, perçus par certains comme un simple partage du pouvoir. La formation d’un gouvernement d’union sacrée après la crise de 2016 en est un exemple, qualifié par ses détracteurs de « partage du gâteau« . Ces critiques s’interrogent donc : la démarche actuelle de la CENCO et de l’ECC échappera-t-elle à cette logique ? Peut-on construire une véritable cohésion nationale sur d’autres fondements que la répartition des postes et des responsabilités ? Voilà tout l’enjeu.
La rédaction de b-onetv.cd