L’année 2024 a été jalonnée d’événements politiques majeurs, marquant une étape cruciale dans l’histoire récente de la République démocratique du Congo. Entre l’installation des institutions issues des élections générales de décembre 2023 et les débats sur une possible réforme constitutionnelle, le pays a vécu une année riche en rebondissements.
L’année a débuté avec la prestation de serment de Félix Tshisekedi, réélu président de la République avec 73 % des voix, selon les résultats définitifs de la Cour Constitutionnelle. Lors de son investiture, il a présenté les grandes lignes de son second quinquennat, axé sur six engagements majeurs : la création de six millions d’emplois, la protection du pouvoir d’achat, l’amélioration de la sécurité, la diversification économique, l’accès aux services sociaux de base, et l’efficacité des services publics. Contrairement aux précédentes élections de 2006 et 2011, marquées par des contestations violentes, celles de 2023-2024 se sont déroulées dans un climat relativement apaisé, ce qui témoigne d’une avancée démocratique notable.
L’installation des nouvelles institutions a été un processus complexe. L’Union Sacrée de la Nation, coalition présidentielle, ayant obtenu la majorité aux législatives, a désigné Augustin Kabuya comme informateur pour identifier une coalition majoritaire. Ce processus a abouti à la nomination de Judith Suminwa comme Première ministre le 1ᵉʳ avril, une première historique pour une femme en RDC. Malgré son ambition initiale de former un gouvernement réduit, Judith Suminwa a dévoilé en juin une équipe de 57 membres. Le 13 juin, son Programme d’Action a été présenté au Parlement, obtenant l’approbation nécessaire pour entamer son mandat.
L’installation des bureaux des deux chambres a mis en lumière les fragilités de la coalition présidentielle. À l’Assemblée nationale, des luttes internes ont conduit à des primaires pour désigner Vital Kamerhe comme président du bureau, un processus inédit en RDC. Kamerhe a été élu aux côtés de Christophe Mboso et Bahati Lukwebo. Au Sénat, Sama Lukonde, ancien Premier ministre, a été élu président, mais non sans résistance de certains groupes politiques.
Le 19 mai, un événement politico-sécuritaire majeur a ébranlé le pays : une tentative de coup d’État orchestrée par le groupe New Zaïre, dirigé par Christian Malanga. Les putschistes ont brièvement pris d’assaut le Palais de la Nation, bureau de travail du chef de l’État, et attaqué la résidence de Vital Kamerhe, sans succès. L’attaque a coûté la vie à deux policiers chargés de la protection de Kamerhe. Cet épisode a mis en lumière les défis persistants en matière de sécurité.
En fin d’année, le débat autour d’une réforme constitutionnelle s’est intensifié. Félix Tshisekedi a exprimé son souhait de modifier la Constitution de 2006, qu’il considère comme un texte imposé par des intérêts étrangers. Cette position, affirmée lors de ses tournées dans le Grand Oriental, le Grand Katanga et le Grand Kasaï, a suscité des réactions contrastées.
L’opposition, menée par des figures comme Delly Sesanga, considère cette réforme comme une tentative voilée de préparer un troisième mandat présidentiel, malgré les limitations actuelles. Des manifestations organisées par la coalition Sursaut National regroupant des structures politiques telles que le FCC, Ensemble et l’ECIDE, LGD ont montré leur désaccord. À contre-courant, Adolphe Muzito, un autre leader de l’opposition, soutient cette réforme, ajoutant une nuance au débat.
L’année 2024 a consolidé certaines avancées démocratiques, tout en révélant les tensions persistantes autour de la gouvernance et de la stabilité politique. Alors que la RDC s’engage sur la voie de réformes importantes, 2025 s’annonce comme une année décisive pour déterminer l’avenir politique du pays.
Emille Kayomba