La République du Congo (Brazzaville) a mis un terme définitif au controversé contrat emphytéotique de cession de terres agricoles au Rwanda, signé en 2022. Une décision politique, stratégique et souveraine qui mérite d’être saluée, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans un contexte où les actions de Kigali sont de plus en plus décriées à travers le continent. Pour la République démocratique du Congo (RDC), qui subit l’agression militaire directe du Rwanda via les rebelles du M23, cette rupture sonne comme un désaveu clair et net d’un régime accusé de fomenter l’instabilité régionale.
Le gouvernement congolais de Brazzaville, par la voix de son porte-parole Thierry Lézin Moungalla, a expliqué que cette décision fait suite au non-respect par les entreprises rwandaises des engagements contractuels, notamment le démarrage des travaux prévu au 8 décembre 2024. Le ministre d’État en charge des Affaires foncières a donc notifié formellement l’annulation du contrat, mettant un terme à une polémique qui avait suscité une vive émotion au sein de la population congolaise et une profonde inquiétude à Kinshasa.
Mais au-delà de la simple question de conformité contractuelle, cette décision est une affirmation forte de la souveraineté des États africains face à l’influence rampante de Kigali, qui a souvent usé de mécanismes économiques pour étendre ses intérêts politiques et géostratégiques. Car il ne s’agissait pas simplement d’une coopération agricole : les terres identifiées se trouvaient dans des zones sensibles, et leur exploitation par des intérêts contrôlés depuis le Rwanda posait un problème de fond en matière de sécurité, de souveraineté et de transparence.
Cette annulation intervient dans un climat régional tendu, marqué par les crimes de guerre et les exactions commises par les rebelles du M23 dans l’Est de la RDC, largement soutenus, armés et commandés par Kigali selon de nombreux rapports indépendants, y compris des Nations unies. Les récents événements, notamment la prise de Goma et Bukavu par ces rebelles, ainsi que les milliers de morts et de déplacés, ont choqué la conscience internationale. La RDC, victime directe de cette agression, ne pouvait que voir d’un très mauvais œil tout projet susceptible d’étendre l’influence rwandaise dans la région.
En mettant fin à cet accord, Brazzaville envoie un message fort : l’Afrique centrale ne sera pas le terrain de jeu de Kigali. Le respect des peuples, de la paix et de l’intégrité des nations prime sur des intérêts privés douteux déguisés en investissements agricoles.
Pour Kinshasa, cette décision constitue une victoire symbolique et diplomatique, qui conforte la posture de la RDC sur la scène africaine. Depuis plusieurs années, le gouvernement congolais, sous la présidence de Félix Tshisekedi, mène une campagne internationale soutenue pour dénoncer l’agression rwandaise et isoler Kigali. Cette rupture est donc un signal encourageant : les masques tombent, et les pays africains commencent à prendre leurs distances avec un régime dont les ambitions régionales sont de plus en plus contestées.
La RDC, en guerre pour sa survie, a plus que jamais besoin de solidarités concrètes. En mettant un terme à un contrat sensible avec Kigali, le Congo-Brazzaville s’inscrit dans une dynamique de prudence géopolitique et de solidarité implicite. C’est une leçon de vigilance, de responsabilité et de bon sens.
L’annulation de ce contrat n’est pas un simple litige foncier. C’est un acte politique fort, une réponse claire à l’agression, à la duplicité et à l’influence toxique. C’est aussi le signe qu’une autre Afrique est possible : une Afrique lucide, vigilante, souveraine. Une Afrique qui ne se laisse pas séduire par des alliances dangereuses, mais qui place la paix, la sécurité et la dignité de ses peuples au centre de ses choix.
La République du Congo a fait le bon choix. Et la République démocratique du Congo salue ce signal fort.
Junior Kulele