L’organisation Human Rights Watch (HRW) a publié, ce vendredi 23 mai 2025, un rapport accablant sur les exactions commises par les miliciens Wazalendo dans la province du Sud-Kivu, théâtre de violents affrontements entre les Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) et les rebelles de l’AFC/M23 soutenus par le Rwanda. Le rapport dénonce des « abus généralisés » contre les civils et exhorte le gouvernement congolais à désarmer ces groupes armés locaux.
Selon HRW, les Wazalendo, qui appuient parfois les troupes congolaises dans les combats, « ont battu, tué et extorqué des civils, parfois sur la base de critères ethniques ». Ces actes sont commis dans un contexte d’impunité grandissante, dans une région marquée par près de trois décennies d’instabilité.
Clémentine de Montjoye, chercheuse senior à HRW pour l’Afrique, avertit que le soutien de Kinshasa à ces milices pourrait faire des FARDC des complices d’exactions. « L’armée congolaise risque de se rendre complice d’exactions en soutenant les milices Wazalendo. Les autorités congolaises devraient cesser de soutenir la coalition Wazalendo, la désarmer, mener une enquête impartiale sur les abus et poursuivre tous les responsables », a-t-elle déclaré.
Le rapport met également en lumière les pratiques d’extorsion sur les populations civiles. Au cours des mois de mars et avril, des combattants Wazalendo ont érigé des barrières sur les principales routes reliant plusieurs villes du Sud-Kivu. À ces postes, ils ont exigé entre 500 et 1 000 francs congolais (environ 0,17 à 0,34 USD) à chaque passant. Une pression économique insoutenable pour une population déjà fragilisée.
Le gouverneur intérimaire du Sud-Kivu, Jean-Jacques Elakano, avait lui-même reconnu l’ampleur du phénomène, affirmant le 23 avril que ces miliciens empêchaient la collecte d’impôts par l’État, tout en se substituant à lui. Un habitant d’Uvira, interrogé par HRW, affirme que certains Wazalendo se comportent comme une police parallèle, infligeant des fouets à des hommes et des femmes accusés de « comportements inappropriés ».
Créés en réaction à la résurgence du M23 en 2021, les Wazalendo regroupent des jeunes congolais mobilisés pour « défendre la patrie ». Leur présence sur les lignes de front, bien que souvent saluée par Kinshasa comme une forme de résistance populaire, est de plus en plus critiquée pour leurs dérives. Des affrontements internes avec les FARDC ont même été enregistrés, causant des pertes civiles et militaires.
Dans un climat régional de plus en plus tendu, marqué par l’implication présumée du Rwanda et l’échec des initiatives de paix à apaiser durablement l’Est du pays, ce rapport de HRW vient raviver les inquiétudes sur la militarisation communautaire et la perte de contrôle des autorités congolaises sur certains groupes armés.
L’organisation de défense des droits humains appelle les partenaires internationaux de la RDC à conditionner leur soutien militaire et financier au respect des droits humains et à une stratégie claire de désarmement et réintégration de ces milices.
Ce nouveau signal d’alerte place Kinshasa face à ses responsabilités. Entre la nécessité d’une réponse militaire à la menace rebelle et l’obligation de protéger les civils, les autorités congolaises devront désormais clarifier leur position vis-à-vis des Wazalendo, dont le rôle devient de plus en plus ambivalent. Le temps d’une stratégie tolérante semble révolu.
La rédaction de b-onetv.cd